Carnet d'une Ghoulehttps://blog.witch.academy/~/CarnetDuneGhoule@plume.luciferi.st/atom.xml2021-11-20T16:31:23.977953+00:00<![CDATA[Rivalité sororale et patriarcat.]]>https://plume.luciferi.st/~/CarnetDuneGhoule/rivalité-sororale-et-patriarcat/2021-11-20T16:31:23.977953+00:00Ghoulehttps://plume.luciferi.st/@/Ghoule/2021-11-20T16:31:23.977953+00:00<![CDATA[<p><em><strong>[TW - Violences, maltraitance, pression familiale]</strong></em></p>
<p>Je ne sais pas si tu as des frères et sœurs, en tout cas si tu en as peut-être que mon expérience te parlera. Pour te présenter assez courtement la situation : je suis née dans une famille avec trois enfants, je suis le deuxième. Géniteurices traditionalistes avec des idées bien conservatrices, génitrice tyrannique, pas de super bases pour construire des relations saines comme tu peux le constater. Cela n’a pas loupé. </p>
<p>Avoir une génitrice stricte pas à l’écoute, qui a vécu une enfance violente, très exigeante et traditionaliste elle-même, a créé des tensions au sein des relations sororales que j’ai pu tisser. Quand on est assigné.e femme, on a tendance à avoir davantage de pression dans ma famille (comme dans beaucoup d’autres même si les mentalités évoluent doucement), due notamment aux normes et injonctions sociales suivant le modèle des rôles de genre qui découle du patriarcat. On porte donc plusieurs responsabilités depuis la jeunesse et l’âge sera important : faire le ménage, savoir faire la cuisine, (bien) travailler à l’école, avoir une bonne réputation, parler correctement, servir sa famille jusqu’à en fonder une (on nous répète sans cesse que pour quitter le foyer familial, le mariage est un passage obligé), avoir une apparence qui correspond aux normes imposées tout en suivant une certaine modernité. </p>
<p>Ma génitrice, ayant vécu dans la violence lors de son éducation, a fait usage de celle-ci pour en faire de même. Ce qui a créé de la crainte, du manque de confiance (en soi également), de la déception, et ce, de nombreuses fois (liste non exhaustive). Cette violence, à la fois physique, psychologique et verbale, a façonné le terrain qui a fissuré les relations sororales au sein de notre famille. Même si l’entraide a déjà été présent, elle s’est dissipée, avec une sœur en particulier. Il faut savoir que la plus jeune d’entre nous est née lorsque la famille traversait une sorte de transition : l’environnement était devenu un peu moins strict, mais la pression des responsabilités pesaient énormément encore sur l’aînée et moi-même. Lorsque nous nous sommes rendu.e.s compte que la plus jeune avait moins de tâches, nous avons nous-mêmes fait preuve de violence. “Pourquoi fait-elle moins que nous ?” demandait-on de manière <em>presque</em> légitime, car on nous présentait en permanence la situation comme équitable, sans “favoritisme”. Comme si les enfants, adolescent.e.s, ne pouvaient pas remarquer les détails, sans compter la malhonnêteté de la génitrice qui vivait (et vit encore) dans le déni, préférant croire quelle appliquait des valeurs “justes” selon elle.</p>
<p>Des responsabilités distribuées de manière inéquitable, dans un contexte où il n’y a pas d’écoute, où la violence est le quotidien. Il ne manquait plus qu’une chose (en plus de tous les autres facteurs) pour fissurer encore plus ces relations : <em><strong>la rivalité</strong></em>.
Quoi de mieux pour pousser de jeunes personnes à entrer dans les normes sociales qu’en les comparant à d’autres personnes ? Et mieux, en les comparant à des personnes proches comme les frères ou les sœurs ? Même si ce fut inconscient, ce climat de rivalité toxique s’est peu à peu installée, nous obligeant ainsi à nous plier pour avoir l’approbation de la famille pour ne plus subir certaines violences, pour se sentir valorisé.e, pour ne pas se faire exclure ou agresser. Aller dans le camp des agresseur.se.s pour se protéger (consciemment ou non), et trouver une place, celle que le patriarcat daigne donner aux femmes et personnes AFAB, pour ne pas subir (trop) de misogynie quand on défend nos libertés, pour ne pas être la cible d’attaques assassines lorsqu’on nous recrache les mêmes injonctions dégoulinant de sexisme, pour mieux écraser les personnes opposées parce qu’écraser les autres, ces gens qui revendiquent leurs droits, c’est rassurant, et ça prouve qu’on est pour <em>La Sainte Norme</em>.</p>
<p>Cette rivalité s’est construite en partie autour de comparaisons de supériorité. Donc une personne était toujours présentée comme supérieure et l’autre inférieure, ce qui est très violent. Cela veut dire qu’implicitement, on nous faisait comprendre quotidiennement que les gens ont une valeur et qu’elles se mesurent en fonction des attentes parentales et sociales. Et à un moment, j’ai été l’enfant supérieur. Je <em>travaillais bien</em> à l’école, je faisais tout ce qu’on me demandait, j’étais la “fille sage et intellectuelle” (peut-être qu’on me considère encore comme telle d’ailleurs, j’en suis écœurée). L’aînée n’a certes pas ressenti l’expérience de la même façon : elle reconnaissait mes <em><strong>“qualités”</strong></em> (appelons cela “actes de survie” parce que c’était soit les bonnes notes et le calme, soit les insultes et la ceinture) tout en étant persuadée d’être supérieure grâce à son statut et son parcours de fille aînée. La plus jeune en revanche a voulu faire ses preuves, et là la fissure est devenue un cratère au fil des années et n’est peut-être pas prêt de se refermer. </p>
<p>Je suis devenue sa rivale à force d’être comparé.e, et même si j’avais compris au bout d’un moment que la situation n’était pas normale, que je tentais tant bien que mal de construire une vraie relation sororale avec elle, la rivalité a rattrapé ces efforts. Sans parler du fait que j’ai dû lui accorder moins d’attention à un moment pour <em>réparer</em> tout cela à cause du contexte au collège et l’aînée avait d’énormes problèmes au sein de la famille, ce qui faisait qu’elle a fini par rejeter les activités communes. De ce sentiment d’abandon, donc ressenti par la plus jeune, est né le besoin de se raccrocher à la seule chose qui était valorisée à la maison : les attentes et injonctions. Dans notre famille, les études sont certes très valorisées, en revanche il y a une chose encore plus valorisée : le mariage et les traditions (notamment religieuses). Ainsi, la plus jeune sœur a pris comme modèle des idées conservatrices pendant que je tentais de survivre et que l’aînée cherchait à trouver un moyen de partir. </p>
<p>Entre l’épuisement qu’a généré l’environnement familial toxique, car très à cheval sur les normes et injonctions, les violences vécues à la maison et pendant la scolarité, la charge mentale plus que lourde à de jeunes âges, le manque de liberté, de bonheur et d’intimité (car famille très intrusive et les femmes, en tout cas dans ma famille, n’ont pas vraiment droit à l’intimité parce que les parents sont propriétaires, c’est atroce de l’écrire, mais c’est leur vision de la famille), le contrôle constant sur nos corps et les comparaisons à répétition et j’en passe…</p>
<p>Tous ces éléments reliés les uns aux autres montrent que le patriarcat détruit toute forme de terrain propice à la solidarité, à la sororité, surtout dans ce genre de situation. Ma génitrice est donc le maillon d’une longue chaîne qui, malgré tout, a pu se briser. Nous n’avons pas vécu à la même époque, cela joue aussi beaucoup, pour autant, les conséquences sont là. Cette jeune sœur qui ne lit notre relation qu’à travers le prisme d’une rivalité violente n’aspire qu’à dépasser cette valeur que l’on m’a assignée contre mon gré. Et chaque fois qu’elle en a l’occasion, pour n’importe quel sujet, n’importe quelle situation, elle rappelle ses réussites et dévalorise les miennes, compare sans cesse nos victoires pour se rassurer, en glissant parfois des insultes grossophobes, misogynes, car entrer dans les normes physiques c’est <em><strong>important</strong></em> (non.). Et chaque fois que notre génitrice lui fait des reproches, la rabaisse en faisait des comparaisons de supériorité en me montrant comme un modèle qu’il faut suivre (alors que je n’ai rien demandé et que c’est dégueulasse de faire ça), elle cherchera, par une violence répondante, que non, elle ne vaut pas moins, mais plus. Qu’elle a peut-être pas mes qualités, mais qu’elle en a de meilleures. Qu’elle n’a peut-être pas fait des études longues, mais qu’elle, “au moins”, va respecter les traditions familiales et religieuses. La remise en question et la réflexion ont été mis au placard et seules les idées conservatrices sont dignes d’être une ligne directrice, car c’est devenu son seul moyen de <em><strong>prouver sa valeur</strong></em>.</p>
<p>C’est juste désolant. Désolant de l’écrire, de le voir, de s’apercevoir de la violence que c’est. Pas merci au patriarcat. Certes, les personnes qui ont fait preuve de violence sont pas moins coupables à cause des biais. Mais c’est une preuve de plus que les idées ne devraient pas être sous-estimées. Elles animent les personnes qui les défendent, parfois très fermement. </p>
<p>Si tu as vécu toutes ces choses, que tu le vis encore, avec ton consentement, j’aurais aimé te faire un câlin. Parce que peut-être que comme moi tu regrettes cette relation qui n’a jamais vu le jour à cause de toute cette violence, et que ce câlin tu aurais voulu le faire avec cette personne avec qui, autrefois, tu partageais tant de choses. Peut-être que toi aussi tu as eu le sentiment de ne pas vivre dans une famille et que tu aurais aimé en avoir une <em><strong>vraie</strong></em>. Je t’envoie tout mon soutien et je sais ce que tu ressens. Je suis désolée que tu aies toi aussi vécu ça, tu n’es pas seul.e, et si un jour tu veux qu’on en parle ensemble (parce que ça peut soulager de papoter avec des personnes qui partagent la même expérience) je répondrai présente. </p>
<p>Pour les personnes qui ont vécu la même chose que ma jeune sœur, plein de soutien à vous aussi. Être comparé.e tout le temps depuis longtemps, ça laisse des cicatrices pesantes et une pression parfois encore plus lourde qu’elle ne l’était, car on a envie de se battre pour prouver, pour montrer quelque chose alors que des gens vous aiment pour qui vous êtes. Je n’imagine pas la souffrance que certaines personnes ont pu ressentir, mais j’ai vu que ça pouvait faire très très mal. Je vous souhaite beaucoup de bonheur.</p>
<p>J’espère que cette lecture n’a pas été trop lourde, ça a été un peu dur de marquer tout ça pour moi, même si dans un sens ça soulage. </p>
<p>Je te souhaite une belle continuation, prend soin de toi et à bientôt.</p>
]]><![CDATA[Blasphémer oui, oppresser non.]]>https://plume.luciferi.st/~/CarnetDuneGhoule/blasphémer-oui-oppresser-non/2021-07-19T19:24:46.098209+00:00Ghoulehttps://plume.luciferi.st/@/Ghoule/2021-07-19T19:24:46.098209+00:00<![CDATA[<p><em><strong>[TW racisme, islamophobie, oppressions, violences]</strong></em></p>
<p>Je n’avais pas eu le temps de rebondir sur pas mal de choses qui ont été dites lorsque le harcèlement violent d’une certaine jeune femme blanche a refait surface. Oui, <em>refait surface</em>, car il a toujours été présent depuis qu’elle s’est exposée sur internet en tenant des propos islamophobes, et c’est quelque chose, d’après moi, qu’il faut reconnaître. Le harcèlement n’est ni un quelque chose qui devrait être applaudi, ni être acceptable. Ce n’est pas une question de mérite ou de punition, c’est <strong>inacceptable</strong>. Encore plus quand c’est un moyen de diffuser de la misogynie bien violente.</p>
<p>Et bien que l’on puisse être <em><strong>contre</strong></em> le harcèlement et/ou la misogynie, on ne peut pas non plus être <em><strong>pour</strong></em> le fait de nourrir des oppressions en utilisant comme prétexte la “liberté d’expression”. Je mets ces termes, “liberté d’expression”, entre guillemets, car cette liberté en réalité ne compte que lorsqu’il s’agit de perpétuer les violences sur les minorités, et en les légitimant notamment à travers des propos haineux et méprisants dans un climat socio-politique où les mêmes groupes oppressés sont souvent les premières cibles dans les médias et autres mesures gouvernementales et institutionnelles.</p>
<p>On ne peut pas non plus être <em><strong>pour</strong></em> que l’on utilise des arguments contre <em>“la religion”</em> pour légitimer des propos pareils ou utiliser les luttes. Vous vous en foutez peut-être, mais il n’y a pas pire insulte et dégueulasserie que de voir que des années de réflexions et de combat soient utilisées pour justifier et excuser des choses pareilles.</p>
<p>Remettons certaines choses au clair avant d’expliciter ce qui me semble être un des fonds du problème.</p>
<p>Dire <em>la religion</em> a autant de signification que <em>la femme</em>. Il faut arrêter de constamment dire cela pour parler de religions en particulier. Peut-être que cela échappe à certaines personnes, mais il y a bien des religions qui existent qui ne sont ni forcément monothéistes, ni forcément abrahamiques. Donc dire “la religion, c’est violent, c’est le mal, c’est le patriarcat” c’est juste mettre toutes les religions au même niveau alors qu’il y en a dans toutes les cultures et qu’elles n’existent pas toutes dans une société patriarcale. Elles n’ont pas non plus les mêmes dynamiques ou enjeux de pouvoir, même entre deux religions abrahamiques par exemple. </p>
<p>Certes, je chipote peut-être un peu sur les mots, mais cet abus de langage nourrit les mêmes stéréotypes sur les religions, à savoir qu’elles se ressemblent toutes et qu’elles sont soi-disant la cause de massacres. Ce n’est pas entièrement faux, surtout pour certaines, pour autant réduire toutes les religions, voire toutes les croyances, à cela et prétendre que toute religion n’est que source de violence et de destruction, c’est prouver qu’il y a non seulement une profonde méconnaissance sur le sujet, mais également une simplification, parfois très malhonnête, de l’Histoire. </p>
<p>On peut être contre toute forme de dogmatisme sans mépriser les personnes croyantes, des croyances ou des religions. On peut croire, être dans une religion et lutter contre certaines formes de pouvoir. Les personnes qui diront le contraire ne connaissent généralement rien aux luttes qui peuvent exister dans les communautés religieuses, et encore moins les enjeux qui existent réellement dans ces dernières. Et d’une religion à une autre ce ne sont pas les mêmes débats et réflexions qui se posent, puisqu’en fonction de la société où on vit chaque religion n’a pas la même place du tout. Il serait temps que les gens prennent conscience de ça.</p>
<p>Ce n’est pas un sujet simple, c’est sûr. On peut comprendre que ce soit plus facile de simplifier, toutefois cette simplification a des conséquences qui sont néfastes la plupart du temps : perpétuer des violences en se complaisant dans l’ignorance et les clichés par exemple. Cela ne promet rien de bon comme on peut s’en douter, encore moins pour les personnes qui sont ciblées.</p>
<p>Personnellement je suis musulmane, queer et féministe. Mes croyances ne m’empêchent pas de m’épanouir ou de réfléchir, c’est le cadre familial et social qui m’oppresse. Et mes positions politiques, mon intérêt pour les sciences, ainsi que les luttes que je mène, ne m’empêchent ni de croire en Allah, ni de croire aux lutins. </p>
<p>Abordons le vif du sujet à présent : les propos islamophobes qui ont été tenus et le fameux <em>droit au blasphème</em>.</p>
<p>Cette jeune femme qui a diffusé son discours islamophobe a été très soutenue par beaucoup de personnes se situant politiquement à Droite, voire chez l’Extrême Droite. Mais aussi par des personnes de Gauche. Ce qu’elle disait, de mémoire, la première fois qu’elle a parlé publiquement de l’Islam en étant relayée massivement, c’était qu’il s’agissait d’une “religion de haine et de violence” (entre autre). Suite à cela elle s’est faite et se fait probablement encore harceler aujourd’hui pour avoir tenu ce genre de propos. </p>
<p>Au-delà du fait que le harcèlement soit inacceptable, des débats ont ressurgi autour de la liberté d’expression et du blasphème. </p>
<p>Le blasphème, d’après le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales, a pour définition :
<em>Parole, discours outrageant à l’égard de la divinité, de la religion, de tout ce qui est considéré comme sacré</em>.</p>
<p>Des personnes la soutenant revendiquaient/revendiquent, en l’imitant, le droit au blasphème. En soi, blasphémer n’est pas un souci. Sauf que si on recontextualise : ces propos islamophobes ont été tenus et défendus dans une société profondément raciste et, je vous le donne en mille : islamophobe aussi. Société où les personnes portant le hijab et/ou le burkini sont pointées du doigt chaque année sur les plateaux télés. Même en hiver, des personnes ni musulmanes ni concernées ont commenté le burkini en parlant “d’imposer sa religion”, elles ont fait des débats sur comment les personnes musulmanes doivent se vêtir ou non en évoquant la laïcité de manière très malhonnête. Chaque fois qu’une personne identifiée comme musulmane fait quelque chose d’affreux, on demande des excuses de la part de toute la communauté religieuse. On vit dans un pays où on utilise les combats féministes pour légitimer les discours islamophobes et “libérer les femmes musulmanes” qui reçoivent des leçons, même dans les communautés féministes de gauche, sur comment lutter. On vit dans un pays où on associe Islam et terrorisme. </p>
<p>Je pourrai continuer la liste encore longtemps.</p>
<p>Il est là un des cœurs du problème concernant cette affaire : le fait d’évoquer le droit au blasphème que quand (ou alors quand très souvent) ça ouvre la porte au renforcement des oppressions qui visent les personnes musulmanes, et à légitimer des propos haineux dignes de l’Extrême Droite.</p>
<p>Blasphémer, c’est ok, mais si revendiquer ce droit sert à légitimer des violences et des oppressions, c’est juste <strong>non</strong>. Et faire partie de groupes marginalisés ou oppressés n’est en aucun cas un passe-droit pour pouvoir cracher son islamophobie.</p>
<p>Il est temps de tenir compte de tout ce que ce genre de discours implique dans ce contexte que j’ai décrit brièvement plus haut. Il est temps aussi de se poser les bonnes questions concernant nos luttes pour nos libertés. On peut penser que “les religions, c’est de la merde”, sans se comporter comme une véritable ordure et traiter les personnes croyantes avec condescendance et mépris. On peut croire et lutter, comme on peut croire et ne pas traiter les personnes athées ou inconnues des religions comme des ignares qui n’ont rien compris à la vie.</p>
<p>Et il serait temps aussi d’arrêter de faire des généralités autour des religions quand vous connaissez que le Christianisme, l’Islam et le Judaïsme. Renseignez-vous avant de dire de la merde. De plus, une religion, c’est rarement juste un livre quand y en a un.</p>
<p>À bientôt.</p>
]]><![CDATA[Rassure-moi, dis-moi que je suis légitime]]>https://plume.luciferi.st/~/CarnetDuneGhoule/rassure-moi-dis-moi-que-je-suis-légitime/2020-12-02T16:34:03.795229+00:00Ghoulehttps://plume.luciferi.st/@/Ghoule/2020-12-02T16:34:03.795229+00:00<![CDATA[<p>Le syndrome de l'imposteur. Celui qui te chuchote sans cesse que tu te mens, que tu n'as sûrement que de viles intentions, et que tout le monde autour de toi te croit à tort, car ce que tu es, ce que tu vis et ce que tu penses ne sont que des mensonges.</p>
<p>Quand on se questionne sur son genre, il arrive qu'on ressente ça. Dans mon cas ce fut un parcours du combattant pour m'affirmer que non, je ne suis pas une personne cis, que oui, je suis légitime de parler de mon vécu, et que non, ce ne sont pas des mensonges, ni des hallucinations et encore moins de la manipulation. Car la première victime dans ce douloureux processus de ce côté de ma facette, parce que normes, parce que peur du rejet et davantage d'exclusion, c'est moi.</p>
<p>Pendant je ne sais pas combien de temps, j'ai vécu dans une sorte d'angoisse, parce que c'était plus effrayant de se reconnaître dans quelque chose qui ne correspond pas à la norme, plutôt que de se dire qu'on s'est menti soi-même. J'avais vécu à peu près la même chose quand j'ai compris que je n'étais pas du tout une personne hétérosexuelle et monoamoureuse. Des fois je me demande si ce n'est pas le résultat direct de cette société qui ne veut pas nous voir. Comme l’hijab que l'on refuse dans de nombreuses situations parce que cela dérange de voir que les personnes musulmanes existent, ces doutes sont nourris pour qu'on se cache.</p>
<p><strong><em>"Ce n'est que de passage". "Tu te fais des films". "Tu fais ça parce que c'est la mode". "Tu n'es pas vraiment queer, tu veux juste attirer l'attention".</em></strong></p>
<p>Entre ces phrases et les injonctions normatives relatives à l'identité de genre, l'orientation romantique et sexuelle, on se retrouve avec un doute profond. Un des moments les plus compliqués dans ce parcours, c'est lorsque j'ai dû réfléchir sur tout cela. Bien sûr, faire un pas dans quelque chose qui sort des habitudes ce n'est pas rassurant, encore plus quand on nous éduque avec des idées conservatrices qui traitent tout ce qui sort de leur cadre comme quelque chose de <em>bizarre</em>. Quel est ce ressenti ? Depuis quand est-il là ? Est-ce que c'est réel, ou n'est-ce que temporaire ? Pourquoi est-ce que je ressens ça ? Tellement de questions qui tendent parfois vers une tentative de justification. Comme s'il fallait constamment se justifier pour exister. Comme si notre propre existence devait être justifiée. Et pour palier une véritable réflexion ou l'acceptation, parfois on attend de notre part ces justifications. "Prouve que tu es légitime".</p>
<p>Certaines personnes pensent que nous ne naissons pas par hasard, que nous avons un rôle à jouer dans cet univers qui nous entoure. Et souvent j'ai l'impression que ce rôle est forcément lié à ces autres rôles que la société nous impose dans les esprits, de manière incessante et autoritaire, car se dire que l'on ne sert à rien n'est pas rassurant. Il est tellement plus facile d'imposer des rôles qui servent à perpétuer des inégalités et oppressions aussi... Surtout quand on fait partie de groupes dominants.</p>
<p>Personne ne peut prétendre détenir la vérité absolue sur la nature de notre existence. Nous sommes juste là, nous vivons, et nous nous confrontons à une réalité que nous n'avons pas choisi. C'est un fait qui devrait suffire. Parfois on veut chercher d'autres raisons. Parfois on les trouve dans la foi, parfois ailleurs, parfois dans le simple constat d'un probable effet de circonstances logique et explicable.</p>
<p>Si nous trouvons autant de raisons d'exister, alors pourquoi s'acharner à trouver des raisons d'une non-existence ? Pourquoi vouloir se prouver que l'on existe pas, alors que nous sommes là, et pourquoi trouver des raisons qui vont à l'encontre d'une éthique que l'on entend dans toutes les bouches sauf pour défendre des minorités ? Peut-être parce qu'en plus de se nourrir des violences et de la marginalisation des minorités pour favoriser les groupes dominants dans un rapport de pouvoir, il est plus rassurant pour les personnes privilégiées de nier ces groupes qui s'affirment de plus en plus.</p>
<p>S'affirmer en défendant notre existence, ça leur fait peur, car cela remet en cause leur place dans la société, leur pouvoir, leurs privilèges, et même leur compréhension du monde en quelque sorte. Peut-être que je me trompe, mais c'est un ressenti. C'est pour ça, je crois, entre autres choses, que beaucoup se vexent, s'indignent quand on leur rappelle que leur pouvoir, leur dominance n'est pas légitime, mais que notre existence l'est. Que leurs pensées sont indignes quand elles consistent à défendre des idées inhumaines, à défendre des inégalités qui plongent des groupes de personnes dans de la souffrance, tandis que les nôtres craignent de moins en moins le questionnement, le changement, l'inclusion et l'acceptation.</p>
<p>Le doute, c'est un moyen de nous faire taire. C'est un moyen de nous obliger à nous cacher, voire à nous nier, pour ne plus se questionner, pour ne plus avoir d'autres horizons que les normes imposées. Le doute, au milieu des violences, dans mon cas, ça a créé une grande angoisse. J'avais peur de me nommer, de me montrer. J'ai cherché chez les autres l'affirmation que je suis bien moi, alors que ces réponses ne pouvaient provenir que d'une personne : moi-même. Qui d'autre que moi pouvait affirmer que je suis une personne non-binaire ? Qui d'autre que moi peut affirmer en quoi je crois ? Ou ce que j'aime ? Personne n'a vécu mes expériences, mes ressentis. Personne ne s'est posé les questions qui ont hanté, ou qui hantent encore, mon esprit.</p>
<p>Je me suis questionnée. Je me suis niée. Je me suis questionnée. J'ai cherché. J'ai trouvé des mots qui touchaient à ce que je ressentais. Je me suis de nouveau questionnée, je me suis cachée, et puis je me suis révélée pour ensuite m'affirmer. Certes, m'affirmer avec une crainte immense, comme beaucoup d'autres personnes, mais avec la certitude que je suis bien là, et que partager cette similarité avec d'autres me donne la force de surmonter ces violences intériorisées. Pas tout le monde n'est passé ou ne passera par là, ce n'est pas ça qui validera quoi que ce soit, surtout que je ne souhaite à personne de vivre autant de douleur ou plus.</p>
<p>Il m'arrive encore de vouloir poser la question aux autres : "Dis-moi, tu penses que je suis légitime malgré mes certitudes ? Tu penses que je suis légitime si je n'ai pas fait de transition médicale ? Si je n'ai pas changé de pronom ? Si je n'ai pas fait de transition sociale ou de passing ? Si je n'ai pas vécu de violences ?"</p>
<p>De nombreuses questions qui soulèvent des problèmes encore très présents dans les milieux queers et/ou militants. Même dans une même communauté on peut être rongé.e par le doute, et on ne décide d'en parler que lorsqu'il n'y a plus cette sorte de grille à cocher case après case pour être validé.e, pour dire qui est légitime ou non de parler. Finalement, le refuge qu'on se figure comporte lui aussi des problèmes, et parfois on décide de s'isoler car on sent qu'il y a un souci. Et mettre le doigt dessus c'est se confronter à d'autres formes de violences, alors qu'on voulait éviter d'en rencontrer davantage.</p>
<p>Que faire dans ce cas, à part faire preuve, peut-être, de bienveillance et d'aller au-delà des biais et diverses violences intériorisées ou reproduites ? Très franchement, je n'ai pas les réponses. Mais je dirai que pour bien commencer, ce serait bien justement de faire preuve de bienveillance. Parce qu'une fois confronté.e à ces questions, on peut vite se sentir très seul.e, et pendant longtemps des fois.</p>
<p>Je ne pense pas dire des sottises mais ça reste un regard subjectif et une partie de mon vécu tout ce que je dis là. Ça ne représentera jamais tout ce que d'autres personnes qui comprendront, ou qui se reconnaitront, ont pu vivre dans leur propre parcours. En tout cas ça fait du bien de pouvoir s'exprimer sur tout ça. Et si ces personnes passent, j'espère de tout cœur qu'elles vivront un bonheur sans limite et qu'elles passent de bons moments. Si vous aussi vous doutez sur votre légitimité, ou que vous vous posez des questions, je vous souhaite de trouver de la bienveillance dans votre entourage, familial ou amical, où vous pourrez discuter de tout ça sans avoir la peur au ventre.</p>
<p>Prenez soin de vous, et à bientôt.</p>
]]><![CDATA[T'as le droit de ne pas parler de tes traumas]]>https://plume.luciferi.st/~/CarnetDuneGhoule/t'as-le-droit-de-ne-pas-parler-de-tes-traumas/2020-10-25T22:52:12.405032+00:00Ghoulehttps://plume.luciferi.st/@/Ghoule/2020-10-25T22:52:12.405032+00:00<![CDATA[<p><strong><em>[TW relation toxique, mal-être]</em></strong></p>
<p>Récemment, j'ai eu une discussion avec une certaine personne qui m'a déçu sur énormément de points. Et je pense que s'il y a une chose qui m'a poussé à ne plus vouloir la retrouver, c'est le jour où elle a osé me demander de lui parler de mes traumas, alors qu'auparavant j'avais pris la peine d'expliquer pourquoi je ne voulais, et ne pouvais le faire.</p>
<p>Elle m'a donc reproché de ne pas parler de ces traumas, et a justifié ce reproche avec des arguments qui étaient révélateurs d'un point de vue assez toxique. Selon elle j'empêchais notre relation d'évoluer, car dans une relation il faudrait <em>tout se dire</em>, tout le temps être collé.e.s l'un.e contre l'autre, toujours faire des choses <em>ensemble</em> et se voir <em>souvent</em>. Cette personne n'avait jamais eu de relation amoureuse avant, et j'ai donc bien insisté et pris le temps d'expliquer que : j'ai des handicaps, je suis limitée car vie et famille compliquées, et que parfois mes troubles et traumas me font vivre un mal-être tel que je n'arrive plus à supporter le contact physique, parfois visuel. Et quand ça arrive, j'ai précisé que je n'aime pas quand on insiste.</p>
<p><strong><em>"Allez, embrasse-moi, juste un bisou."</em></strong></p>
<p>Prendre autant de temps et d'énergie, pour tout expliquer avec patience pour que finalement on te donne l'impression que ta santé mentale ne vaut rien à côté du bien-être et des exigences basées sur les fantasmes de la vie amoureuse de l'autre.</p>
<p>S'il vous est arrivé ce genre de chose, ne culpabilisez surtout pas. Si quoi que ce soit vous met mal à l'aise, santé mentale top ou non, vous avez totalement le droit de refuser, et personne ne devrait vous demander de vous justifier pour cela. Les gens font pas la différence parfois entre <em>essayer de comprendre ce qu'il se passe</em> et <em>se justifier</em>.
La personne dont je parle cherchait sans cesse des justifications, car les explications ne suffisaient pas. Pourquoi ? J'ai une idée, mais si j'y pense je vais m'énerver. Pourtant elles étaient plus que claires :</p>
<ul>
<li>
<p>Des fois je ne me sens pas bien, donc il m'arrive de ne pas désirer de contact physique.</p>
</li>
<li>
<p>Ces moments où je ne me sens pas bien sont liés à mes traumas et troubles.</p>
</li>
<li>
<p>Je ne veux pas, et ne peux pas parler de mes traumas.</p>
</li>
<li>
<p>Parfois, même souvent, j'ai besoin de repos, donc on ne peut pas se voir souvent.</p>
</li>
<li>
<p>J'ai besoin de repos parce que j'ai une fatigue chronique, des douleurs musculaires, et un métabolisme lent.</p>
</li>
<li>
<p>Parfois je m'isole, mais je ne t'aime pas moins pour autant.</p>
</li>
<li>
<p>Ma famille est toxique, ma vie anxiogène, donc je ne contrôle pas totalement mon emploi du temps ou la durée de mes activités.</p>
</li>
</ul>
<p>Tout cela est la liste des explications que je donne quand on me demande pourquoi je ne peux pas faire certaines choses, ou pourquoi je suis distante. S'il s'agit d'autre chose, d'une situation plus particulière, j'expliquerai en général, si j'ai le temps et l'énergie. Mais cette personne, malgré ces explications, n'a cessé de me demander encore et encore pourquoi, en pensant que ce n'était qu'un moyen de créer de la distance ou d'utiliser des prétextes pour ne pas la voir. La confiance était donc déjà morte. Si croire que les problèmes de santé deviennent des prétextes dans une relation qui devrait se baser en partie sur la confiance, c'est qu'il y a un énorme souci. Elle souffrait certes de solitude, mais à part lui écrire quotidiennement je ne pouvais rien faire d'autre. Et cette distance on me la reprochait. Dieu sait combien de fois j'ai dû dire non pour voir des copaines, des amoureux.ses, des fêtes, des réunions, des rassemblements et événements géniaux juste à cause de mes conditions de vie anxiogènes et de ma santé. Alors mettre en doute ma parole sur un sujet qui me touche autant, et qui ne facilite pas du tout mon quotidien, ça m'a indigné.</p>
<p>Il fallait que je rassure tout le temps cette personne, en lui disant bien que je n'avais rien contre elle. Mais j'ai commencé à me sentir étouffée, surtout que la notion de consentement n'était pas toujours au rendez-vous. Quand quelqu'un.e insiste pour un baiser, je regrette mais à mes yeux, c'est qu'elle en a rien à faire de votre consentement. Même si vous changez d'avis au bout de quelques secondes, il faut vous demander la chose suivante :</p>
<p><strong>Si elle n’avait pas insisté, l'aurais-je fait ?</strong></p>
<p>Si la réponse est non, c'est que vous n'étiez pas entièrement consentant.e, et ce n'est pas à vous de vous remettre en question, mais à la personne d'en face.</p>
<p>J'ai donc quitté cette personne pour ces raisons.</p>
<p>Exiger d'une personne qu'elle soit présente pour vous, qu'elle soit avec vous, ou qu'elle réponde à votre idéal du couple et envies, quelle que soit leur nature, c'est juste dégueulasse, et ça l'est d'autant plus quand ces gens restent focalisé.e.s sur leur ressenti, leurs envies sans faire preuve de compréhension.</p>
<p>Je ne peux pas entièrement lui en vouloir dans la mesure où cette personne est très seule habituellement. Je peux comprendre, et je voulais faire cet effort de lui expliquer, de la voir aussi souvent que possible, et de montrer un maximum d'affection, même quand ça n'allait pas. Et puis surtout de toujours être honnête et transparente, même si ça faisait mal. Toutefois au bout de deux mois à répéter les mêmes choses, repousser les insistances parfois nombreuses, ce n'était pas ce que je voulais vivre sur une longue durée.
J'ai donc mis un terme à cette relation.</p>
<p>Non, aucune personne ne devrait se justifier d'exister ou de ne pas vouloir faire certaines choses sous prétexte que "le couple c'est ça". Personne ne devrait se forcer à parler de ses traumas juste parce que "en couple faut tout se dire, et moi je t'ai confié plein de choses". Personne ne devrait se forcer à faire quoi que ce soit si on en a pas envie, c'est la base du consentement. Si une personne en face de vous ne veut pas comprendre ça, passez votre chemin, et prenez soin de vous.</p>
<p><strong><em>Si vous ne voulez pas parler de vos traumas, vous en avez totalement le droit.</em></strong></p>
<p>Et si vous voulez faciliter la communication en utilisant le moins d'énergie possible quand vous avez un ou des handicaps et/ou troubles, vous pouvez suivre les pistes suivantes,
<em>à modifier selon vos préférences</em> :</p>
<ul>
<li>
<p>Établir la liste de vos handicaps et/ou troubles, en expliquant bien quel impact ils ont sur vous (éventuellement expliquer pourquoi et comment ils fonctionnent).</p>
</li>
<li>
<p>Expliquer comment l'autre peut vous aider à les gérer.</p>
</li>
<li>
<p>Si vous faites des crises, et qu'elles se passent souvent de la même façon, écrire comment elles se produisent et expliquer ce qui peut vous aider à les calmer ou à les vivre sans danger.</p>
</li>
<li>
<p>Lister ce qui peut provoquer ces crises, et les symptômes de celles-ci si vous ne pouvez pas les verbaliser le moment M.</p>
</li>
<li>
<p>Décrire les différents comportements que vous pouvez adopter dans les périodes difficiles, pour que l'autre comprenne bien comment vous fonctionner en cas de mal-être.</p>
</li>
<li>
<p>Lister ce qui pourrait vous aider à surmonter ce mal-être pour réunir ces conditions avec l'autre si cela est possible.</p>
</li>
</ul>
<p>Ce ne sont que des pistes, mais ça vous donnera peut-être des idées. Ce sera déjà moins épuisant que de se répéter continuellement. Comme ça, si l'autre a une question relative à vos handicaps, il vous suffira d'évoquer la liste, la fiche, le PDF complet qui explique tout ce que cette personne aura besoin de savoir. De même, si vous rencontrez de nouvelles personnes ça pourrait vous être utile.</p>
<p>Préservez-vous, et à bientôt.</p>
]]><![CDATA[On m'a enlevé mon tabouret]]>https://plume.luciferi.st/~/CarnetDuneGhoule/on-m'a-enlevé-mon-tabouret/2020-10-16T10:20:42.021357+00:00Ghoulehttps://plume.luciferi.st/@/Ghoule/2020-10-16T10:20:42.021357+00:00<![CDATA[<p><em><strong>[TW - Validisme, violences]</strong></em></p>
<p>Je ne me souviens même plus quand on m’a retiré cet objet qui m’aidait quotidiennement, mais je me souviens très bien de ces arguments pourris venant de ma génitrice : “c’est moche” ; “c’est pas esthétique” ; “c’est encombrant”, alors que l’esthétique, quand il s’agit de santé, on s’en fout. Oui le confort visuel c’est important pour se sentir chez soi, mais là c’est un objet qui me permettait de limiter des dégâts physiques. Mais ça, on s’en fiche apparemment. Pour le côté “encombrant”, en réalité la place ne manque pas. Il suffisait de le déplacer, l’allonger sur le côté pour pouvoir circuler aisément. Au début je pouvais bénéficier de cette aide que m’apportait le tabouret pourtant. J’ai perdu ce droit pour des raisons futiles. Et depuis, ça me ronge. Parce que chaque fois que je vais me doucher, j’ai mal. J’ai mal au dos, aux jambes, avec mon alimentation hasardeuse j’ai facilement des vertiges, surtout en fin de journée, moment où j’ai l’habitude d’aller me doucher. </p>
<p>De toute manière, toutes ces justifications qui veulent juste minimiser mes douleurs physiques et les risques de me blesser n’ont rien de cohérent ou de logique. Tout ce qui ressort de ces paroles c’est : “non, ta santé n’est pas importante, tu n’as pas de handicaps”. </p>
<p>Nier le handicap c’est aussi priver les gens d’avoir des aménagements adéquats qui servent à ne pas avoir davantage de difficultés pour juste <strong>vivre</strong>.</p>
<p>Et parce que j’ai des handicaps pas visibles pour ce monde validiste, on m’a refusé des tabourets ailleurs que sous la douche. Des <em>tabourets</em> psychologiques, des <em>tabourets</em> scolaires, et même des <em>tabourets</em> émotionnels. Tout ce qui me reste c’est donc : les douleurs, les crises, le manque de confiance en soi, le renfermement, la peur, l’anxiété, les hallucinations en tout genre. Il était déjà difficile de se sentir légitime, de se rendre compte que j’avais un handicap depuis longtemps. Seulement c’était toujours juste moi qui ne fais pas assez d’efforts, je n’étais jamais assez productive, je n’avais pas une assez bonne mémoire, je ne contrôlais pas assez mes troubles.</p>
<p>Et même des personnes en qui j’avais confiance m’ont dit des choses de ce genre. “Tu ne te défends pas assez” ; “Moi j’aurais…”. </p>
<p>Prenez mes troubles. Prenez mes souvenirs, mes douleurs, mes problèmes, et allez vous défendre devant des gens qui abusent psychologiquement de vous et vous épuisent moralement au quotidien. Allez dire à ces personnes qui vous ont détruit.e que c’est fini et qu’iels doivent bien se comporter sous peine de nous voir en colère. </p>
<p>Ces proches, je les vois mal affronter tout ça aussi aisément qu’iels le prétendaient. Cela fait des années que je supporte cette situation, parce que je ne veux pas me retrouver sans études, dehors ou subir davantage de violences pour faire valoir mes droits. Pendant longtemps j’ai dû affronter ça toute seule, et n’entendez pas un ton fier, mais plutôt désespéré. Comment arriver à faire confiance quand dès l’enfance, les personnes qui devaient vous protéger, ont été les premières à vous violenter ? Par la suite je me suis rendue compte que ce n’était pas un problème individuel, mais bien plus général, que ce n’était pas de la victimisation mais une oppression.</p>
<p>Ne pas pouvoir communiquer conduit à ne pas pouvoir demander d’aides, et l’absence d’aides engendre une accumulation de problèmes supplémentaires qui auraient pu être évités. Beaucoup de personnes sont encore convaincues que c’est une manière d’attirer l’attention, d’avoir droit à des “privilèges” dont on n’aurait pas besoin. </p>
<p>C’est vrai que c’est enviable d’avoir des difficultés au point de ne plus avoir d’énergie, et de ne pouvoir rien faire. De lutter pour avoir des aménagements adéquats pour niquer encore plus sa santé dans ce système de merde. D’attendre parfois des mois pour obtenir un statut qui correspond à notre situation.</p>
<p>Ne pas pouvoir rester debout pendant un temps prolongé peut provoquer, dans des situations comme sous la douche, des risques de chutes, des douleurs qui s’accumulent ou s’aggravent, dans les jambes ou le dos. Parfois les genoux et les pieds également. Cela provoque donc, selon les périodes et activités effectuées dans une journée, selon leur diversité, leur durée, leur nombre et l’effort qu’elles nécessitent, un manque cruel d’énergie. Énergie dont on a besoin pour parfois faire des choses simples comme boire, manger, organiser ses affaires, se changer, etc.</p>
<p>Ce qui rend les handicaps invivables, c’est l’environnement inaccessible autour de nous, ce sont les multiples refus d’aides, les démarches interminables parfois pour obtenir des droits dont toute personne handicapée devrait bénéficier, ce sont les personnes valides qui ne cherchent pas toujours à nous inclure, nous menant à une isolation sociale. </p>
<p>Un <em>tabouret</em> ça peut être un objet très utile (fauteuil roulant, pâte à malaxer, casque anti-bruit, atèles, béquilles, cannes par exemple), mais aussi une organisation : c’est prévoir des activités adaptées à notre énergie, c’est rendre accessible des évènements, et bien d’autres choses selon les besoins des personnes concernées.</p>
<p>Toutes ces choses ont aussi été expliquées et développées par Matthieu, un vidéaste qui publie du contenu notamment militant sur le handicap, le validisme. Il partage tout cela sur la plateforme YouTube, voici quelques playlists de sa chaîne si ça vous intéresse. Si vous êtes une personne valide, je vous recommande chaudement d’aller les regarder, et de voir le reste de sa chaîne :</p>
<ul>
<li>
<p>Playlist <strong>Tourner en rond</strong>
(Vidéos sur le handicap en général) : https://www.youtube.com/watch?v=6jYfNTQmZFg&list=PLjTG0k80imMvWM9JJZKVDyiCgvnI5Sma6</p>
</li>
<li>
<p>Playlist <strong>Des objets pour un quotidien plus adapté</strong>
(Conseils sur des objets qu’on peut acheter qui selon les besoins peuvent aider) :
https://www.youtube.com/watch?v=Xyr9758bbLE&list=PLjTG0k80imMtltHiTyYIAKHAuNBJWqoVT</p>
</li>
<li>
<p>Playlist <strong>Aider une personne malade chronique ou handicapée</strong>
(Conseils sur les aides qui peuvent être apportées à des personnes concernées par le handicap ou des maladies) :
https://www.youtube.com/watch?v=zKgIDIouEGo&list=PLjTG0k80imMseeEgcBnIB2rCEc-6CN6BH</p>
</li>
</ul>
<p>Je vous recommande également les vidéos d’Alistair, qui tient aussi une chaîne YouTube sur laquelle il parle de handicap et d’autisme notamment. Voici quelques playlists :</p>
<ul>
<li>
<p>Playlist <strong>Mieux vivre autiste / Mieux vivre handi</strong>
(Astuces, démarches et objets qui peuvent aider) :
https://www.youtube.com/watch?v=btY__UF2zow&list=PLr5PmuMxokE_JmrbVetjBJp6HE8CFMNAg</p>
</li>
<li>
<p>Playlist <strong>Autisme et Handicap</strong>
(Sujets généraux sur l’autisme et le handicap, déconstruction de stéréotypes) :
https://www.youtube.com/watch?v=AW2cHFmIjsI&list=PLr5PmuMxokE-Ncl_F7SaI2giPJLeBMoGs</p>
</li>
<li>
<p>Playlist <strong>Santé mentale</strong>
(Automutilation et dépendance) : https://www.youtube.com/watch?v=8PSCi4330qA&list=PLr5PmuMxokE_mzc_aPShqAEmztxmEw7-M</p>
</li>
</ul>
<p>Ces vidéos m’ont beaucoup aidé pour certaines difficultés que je rencontre, à pouvoir les cibler et les nommer, alors j’espère qu’elles t’aideront aussi, si tu en as besoin ou que tu sais qu’elles pourront aider une personne de ton entourage. Si tu souhaites en recommander, préciser des choses, témoigner, faire des remarques n’hésite pas à commenter. À bientôt.</p>
]]><![CDATA[Je ne suis ni ta beurette, ni ta rose des sables]]>https://plume.luciferi.st/~/CarnetDuneGhoule/je-ne-suis-ni-ta-beurette-ni-ta-rose-des-sables/2020-06-15T16:15:49.502455+00:00Ghoulehttps://plume.luciferi.st/@/Ghoule/2020-06-15T16:15:49.502455+00:00<![CDATA[<p><em><strong>[TW-Racisme, Sexisme, Fétichisation, Sexualisation]</strong></em></p>
<p>“Beurette”. C’est un mot qui connote tellement d’idées péjoratives, déshumanisantes, réduisant ainsi les femmes et personnes non-binaires nord-africaines à une représentation fantasmée, fétichisée, sexualisée. Comme si elles ne se résumaient qu’à un simple objet de désir, ou qu’elles incarnaient l’image de “la femme superficielle”. Ce mot correspond à tellement de représentations racistes et sexistes. Ici, je parlerai essentiellement de mon expérience avec ce mot. Je rappelle, avant de commencer, que mes adelphes sont entièrement légitimes pour utiliser ce terme dans le but de se le réapproprier ou de s’autodésigner par celui-ci. </p>
<p>Pour ma part, je n’ai jamais aimé ce mot. Je suis née dans une famille maghrébine profondément musulmane et très attachée aux traditions culturelles. Enfant je n’avais pas encore peur de parler de mes origines, des traditions que j’appréciais. Mais dès la primaire, j’ai compris qu’on vivait dans un pays raciste, un jour je pense vous raconter quel a été ce moment déclencheur. Plus tard j’ai donc porté une grande attention aux mots que l’on employait, aux blagues, aux clichés racistes que l’on faisait passer pour des simples plaisanteries, alors qu’il s’agissait de violences. </p>
<p>Au collège, j’entendais souvent le mot “beurette” pour désigner une fille “arabe”, mais avec le temps, je remarquai qu’il était également utilisé pour parler d’une “fille arabe superficielle”. Cette idée s’est étendue sur toutes les filles : les garçons disaient “beurette” pour toute fille paraissant “superficielle, se maquillant beaucoup trop” ou en tant que synonyme du fameux “pot de peinture”, pour critiquer les filles, femmes et personnes non-binaires qui portent beaucoup de maquillage, qui sont passionnées par le maquillage, ou qui se maquillent tous les jours. On retrouve encore aujourd’hui cette vision très sexiste autant chez les hommes, garçons cis blancs (qui en plus d’être sexistes sont racistes) que chez les hommes, garçons cis racisés. </p>
<p>Cependant, dans mon vécu, les mots “beurette” et le célèbre “rose des sables” apparaissaient souvent dans la bouche des hommes cis blancs que j’ai fréquentés au cours de ma vie. Vous devinez sans difficulté que je ne risque plus de les revoir, vu les termes qu’ils ont employé pour me désigner, sans parler de la façon dont ils l’ont utilisé (infantilisation notamment: “ma petite beurette”….)
Sur les sites de rencontres, c’était des “j’aime les arabes, je les trouve tellement exotiques” ou encore “je fantasme sur les arabes”. Je n’avais pas encore vécu la fétichisation. Alors que je n’avais que 16 ans, je suis sortie avec un homme cis blanc de 19 ans. Au-delà de cette relation toxique qui a duré deux ans, cet ex a de nombreuses fois fait des remarques racistes, dont le “je trouve les arabes jolies, elles sont si sensuelles”. Certaines personnes pourraient se dire “ça va, c’est un compliment”. Sauf que non, il n’en est rien, car il réduit les femmes et personnes non-binaires nord-africaines, arabes, à un fantasme, une fétichisation ancrée dans les représentations sexistes.</p>
<p>La rose des sables, c’est une image qui se rapproche de cette vision nauséabonde, en plus de cette intention de valider ou non la beauté ou supposée beauté d’une personne. “Bravo tu es dans les normes de nos fantasmes racistes et sexistes”. Voilà ce que j’entends dans le fameux “rose des sables”, cette image d’une femme ou personne non-binaire “arabe” “sensuelle”, “belle”, que l’on reçoit en prétendant qu’il s’agit d’un compliment.
Nous ne sommes pas des objets. Nous ne sommes pas des fantasmes. Je ne suis ni ta beurette, ni ta rose des sables.</p>
<p>Le racisme et le sexisme ne sont pas seulement des actes de violences physiques. Ce sont aussi des oppressions que l’on retrouve dans ces stéréotypes banalisés, inscrites culturellement dans une Société patriarcale profondément raciste. Ce sont des mots et des figures qui perpétuent une vision très éloignée de la réalité, à la fois réductrice et essentialiste. Quand il m’est arrivé de faire la remarque à ces personnes, aussitôt elles ont cherché des excuses, “oui, mais c’était pour dire des mots gentils”. Que les intentions soient bonnes ou non, n’utilisez tout simplement pas ces termes pour désigner une personne qui n’a rien demandé, et surtout dont vous ignorez la violence dont ils sont imprégnés. </p>
<p>Se détacher de ces représentations, certes, ce n’est pas inné. On se déconstruit au cours de notre vie parce qu’on est né.e.s dans un contexte et un environnement hostiles. Personne ne prend conscience de tout cela par pur hasard, on vit des expériences, on rencontre des gens, on apprend tous les jours sur ce qui nous entoure. Mais il est fondamental d’écouter la parole des concerné.e.s qui peuvent éclairer et/ou compléter les ressources disponibles sur ces sujets. Il faut se renseigner quand on relève l’usage d’un mot avant d’utiliser ou de réutiliser des termes qui ont une signification, une histoire, allant au-delà de la simple intention ou de la parole. </p>
<p>L’excuse “ce sont que des mots”, j’en ai vraiment assez de l’entendre. De plus, on voit toute l’hypocrisie des gens quand iels s’offusquent d’un “j’aime pas les blanc.h.e.s”, en hurlant au racisme, tandis que les personnes racisées reçoivent une avalanche de propos oppressifs, malveillants et haineux quand elles trouvent la force de dénoncer, apportent des critiques, expliquent en quoi le racisme est systémique et témoignent. Et les hommes cis, même racisés, ignorent trop souvent l’agressivité qui émane de ces “simples mots”. </p>
<p>Il est important de rappeler que oui, entre ami.e.s, il arrive qu’on l’utilise, avec des gens que l’on connaît, en qui on a confiance, mais cela ne veut pas dire pour autant qu’il faut l’utiliser pour désigner les autres quand on ne vous a rien demandé, ou pour désigner une catégorie de personnes.</p>
<p>À titre personnel, si ce sont mes adelphes qui me désignent avec ce mot, je tolère, mais j’explique pourquoi cela me gêne (sauf s’il s’agit d’ironie), et pour toutes les autres personnes je le recevrai toujours, et systématiquement, comme une insulte.
Je ne suis pas un objet sexuel, ni une peinture orientaliste. Je suis fière de mes origines, mais mon existence ne se limite pas à celles-ci.</p>
<p>Si vous avez des recommandations ou des critiques constructives à apporter, des articles, des livres, des comptes à conseiller ou des remarques à faire, n’hésitez pas à commenter. Prenez soin de vous, et à bientôt.</p>
<p><em><strong>Quelques ressources</strong></em></p>
<p>Pour revoir un peu l’historique du mot “beurette”, je vous conseille cet article: </p>
<p>Lien - https://information.tv5monde.com/terriennes/beurette-genealogie-d-un-terme-sexiste-et-raciste-312225. </p>
<p>Certains aspects de celui-ci peuvent être critiquables, mais il fournit des informations qui permettent de mieux comprendre son histoire. </p>
<p><em><strong>Quelques comptes à suivre</strong></em> (listes non exhaustives)</p>
<p><strong>Des comptes twitter de personnes racisées que vous pouvez suivre:</strong></p>
<ul>
<li>louzlapoetesse</li>
<li>LeilaWarlock</li>
<li>RokhayaDiallo</li>
<li>kelsiphung</li>
<li>napilicaio</li>
<li>liamourfou</li>
</ul>
<p><strong>Des collectifs disponibles sur twitter que vous pouvez découvrir:</strong></p>
<ul>
<li>DesRacine_e_s</li>
<li>Lavoixracisee</li>
<li>CIrrecuperables</li>
<li>racisees_vs_gdr</li>
<li>afrofemfr</li>
</ul>
<p><strong>Sur instagram:</strong></p>
<ul>
<li><em>habibitch</em></li>
<li>arts_blossom_</li>
</ul>
<p><strong>Des collectifs sur instagram également:</strong></p>
<ul>
<li>decolonisonsnous</li>
<li>assolallab</li>
</ul>
<p><strong>Podcasts qui pourraient vous intéresser également:</strong></p>
<ul>
<li>kiffetarace (sur twitter et Youtube)</li>
<li>Naya Ali (sur Youtube)</li>
</ul>
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